Étiquetté Monsieur Patrimoine, Stéphane Bern nous dévoile les projets de sa mission présidentielle, tout en lançant les illuminations de l'avenue Montaigne, et le débat sur l'entrée payante dans les cathédrales.
3 mois après votre nomination, quel est votre bilan ?
J'ai reçu 1 500 dossiers, entre la Fondation pour le Patrimoine et le Ministère de la Culture, et une plate-forme sera mise en ligne avec une interface pour traiter et suivre ces missions. À mon crédit, je pense avoir contribué à une prise de conscience générale sur l'importance de la sauvegarde du patrimoine. Et enfin, j'ai avancé sur quelques projets comme la Corderie de Marseille, la Halle Industrielle d'Arles et le Musée des Tissus, à Lyon. Je suis interrogé en permanence, je réponds, j'essaie de tenir mon rôle du mieux possible, mais je ne me substitue pas à la puissance publique, je suis là pour aider et venir en renfort.
Où en est le projet du Loto Patrimoine ?
On a pratiquement bouclé le dossier, c'est dans les circuits et ça devrait être opérationnel lors des Journées du Patrimoine en 2018. La première année, la Fondation du Patrimoine aidera à sauver une centaine de monuments. J'aimerais mettre la lumière sur 14 sites emblématiques, un en outre-mer, et un autre dans chaque région administrative. Et puis surtout montrer la diversité du patrimoine : château, église, jardin, maison d'illustre, lavoir, fontaine, tous les patrimoines seront représentés.
Comment gardez-vous votre indépendance ?
Je travaille en toute complicité avec la Ministre de la Culture, Françoise Nyssen, et c'est vrai que j' aiguillonne ses services. Je n'ai pas d'étiquette politique, mais ma légitimité provient de mes émissions, de ma propre restauration et du public. Je n'ai de compte à rendre qu'au public et au chef de l'état ! Les administrations, je suis obligé de faire avec, on n'a pas forcément le même tempo. Sur le fond, la Ministre est derminée à m'aider. Je n'ai pas de date butoir à ma mission que le Président de la République pourrait me retirer à tout moment s'il me trouve trop libre dans mes propos ou dans mes actes. En tous cas, je lui rendrai mon premier rapport dans 3 mois avec une cartographie et une priorisation des monuments en péril, et j'espère trouver des nouvelles formes de financement avec un certain nombre de mécènes qui sont prêts à me soutenir, parce que c'est moi.
Quelle est la restauration qui vous tient le plus à cœur ?
L'urgence absolue, c'est le château de Villers-Cotterêts. On est en train de célébrer en ce moment le 5e centenaire de la Renaissance, et on laisse de côté le château qui est le symbole de ce que François 1er a fait pour instituer dans les actes officiels le français comme langue nationale. Je voudrais en faire le fief de la Francophonie. Donc, ce n'est pas possible, il faut le sauver, et peut-être en confier la partie publique à la CMN, le Centre des Monument Nationaux, pour qu'il trouve très vite les moyens de le faire vivre
Quel est votre monument préféré ?
Le mien ! Je suis très heureux de vivre dans un Monument Historique, le Collège Royal et Militaire de Thiron-Gardais, dans le Perche. Pas parce qu'il est plus beau ou plus prestigieux, mais parce que je sais ce que c'est que de restaurer un monument, de s'endetter jusqu'à la fin de ses jours et de se saigner aux quatre veines pour participer à cet effort national. Voilà, j'y ai mis mon sang, ma sueur, quelques larmes, pas mal d'argent, et j'y suis attaché. Ma partie de travaux est terminée, et j'aide maintenant le maire de la ville à restaurer l'abbatiale qui est mitoyenne.
Vos prochains tournages pour Secrets d'Histoire, c’est où ?
Je vais beaucoup tourner à l'étranger, en Angleterre notamment. On attaque un tournage sur le prince Charles dans quelques jours, et je vais donc me rendre chez lui, à Clarence House. Je vais aussi retourner à la maison, c'est à dire au château de Versailles où il y a toujours un salon non visité ou un appartement pas encore montré au public. Avec la production, on colle à l'histoire, et on se rend sur les lieux où elle s'est déroulée. Et avec le Village Préféré des Français, on va refaire le tour de France pour découvrir des propriétés, rencontrer les propriétaires et les collectivités qui me font part de leurs problèmes, ça m'aide beaucoup dans ma mission.
Avez-vous le 06 de la Reine d'Angleterre ?
En Grande-Bretagne, ce n'est pas 06, ça commence par un autre numéro…
Vous n’êtes pas content de la taxe sur les châteaux !
Non, car on est le pays où il y a le plus de châteaux à vendre, pas moins de 1 000 en ce moment, mais les gens n'ont plus les moyens de les entretenir, ils n'y arrivent plus. On parle toujours de défiscalisation pour faire des travaux, mais si vous n'avez plus d'argent pour faire des travaux, vous défiscalisez quoi ?
En avez-vous parlé avec Emmanuel Macron ?
Oui, je lui ai raconté tout ça, mais ce n'est pas lui qui fait le budget de la nation. Le Président, il préside. Je suis auditionné par des députés, des sénateurs, des conseillers et je leur répète inlassablement de ne pas considérer les châtelains comme des gens riches.
Pouvez-vous nous préciser pourquoi ? (facultatif)