Restaurer un château : un pari fou ?

Laetitia Lapiana
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Rome ne s’est pas faite en un jour, la restauration d’un château non plus. Rêve d’enfance, passion des vieilles pierres, héritage, investissement dans le cadre d’une création d’activité... Quelle que soit la motivation, se lancer dans la restauration d’un château ne s’improvise (surtout) pas et peut ressembler à un pari « fou » tant il mobilise de moyens financiers et humains. Belles Demeures fait le point sur les indispensables à connaître et à pondérer pour éviter de se lancer la fleur au fusil et que le rêve d’une vie ne se transforme en échec cuisant.

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Le Château de la Mothe-Chandeniers, situé au nord de la Vienne, a retrouvé vie et féérie en 2017 grâce à la start-up Dartagnans et au financement participatif de milliers d'internautes. ©gettyimages
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Pour l’amour des vieilles pierres et du patrimoine

Vous êtes féru des vieilles pierres et de patrimoine et rêvez depuis des lustres de vous lancer dans l’achat et la restauration d’un château ? Malgré toute la passion et la verve que vous souhaitez y consacrer, ce projet va vous engager toute votre vie. Même si les opérations de restauration et les grands chantiers peuvent avoir un début et une fin, l’entretien d’un château n’est pas une mince affaire ! À l’heure où les ventes de châteaux explosent en France et où les particuliers sont de plus en plus nombreux à rêver d’une vie de châtelain à l’abri du monde, il est impératif d’appréhender les différentes facettes de ce projet hors-norme, les contraintes et obligations ad hoc, pour profiter pleinement de son nouveau lieu de vie ou d’activité grandeur et splendeur XXL.

La France compte plus de 30 000 châteaux, dont 11 000 seulement sont classés. De fait, c’est au propriétaire d’effectuer la démarche pour que son château soit inscrit ou classé sur la liste des monuments historiques, mais nombre d’entre eux ne franchissent pas le cap en raison des contraintes et obligations légales associées.

Un projet de vie qui ne s’improvise pas

Véritable ruine, dans son jus ou quelque peu délabré, acquérir un château en vue de le restaurer comporte nombre d’obligations et de contraintes qui engagent la responsabilité de son propriétaire. À commencer par vérifier s’il s’agit d’un bien protégé, c’est-à-dire classé ou inscrit au titre des monuments historiques (MH), ce qui ajoute aux impératifs réglementaires, surtout s’il s’agit d’un château classé. Dans ce cas, c’est vous qui endossez le rôle de maître d’ouvrage des différents chantiers, ce qui vous engage notamment à :

  • Définir et à organiser l’ensemble des travaux de rénovation ou de restauration.
  • Choisir un architecte en chef des monuments historiques qui supervisera lesdits travaux en sa qualité de maître d’œuvre.
  • Sélectionner les entreprises et artisans locaux spécialisés dans la restauration de biens classés, afin de garantir la sauvegarde et l’intégrité des lieux, dans le respect de son histoire, de son architecture, des matériaux d'origine et autres particularités.

Pour ce faire, avant même de lancer les travaux, il vous faudra réaliser une étude préalable à la restauration, voire des analyses du bâti et autres diagnostics afin de définir un projet de programme.

Si la restauration d’un château inscrit imposent une demande de permis de construire et l’approbation du préfet de la région, un bien classé fait l’objet d’un permis spécifique. Il doit être validé par la Drac (Direction régionale des affaires culturelles) qui constitue un interlocuteur de choix à chaque étape du projet de restauration, mais aussi pour l’obtention de subventions, dont le montant peut atteindre 50 % du coût des travaux.

L’aventure, c’est l’aventure, mais à quel prix ?

Il ne faut pas se leurrer : si l’achat d’un château peut parfois sembler une « bonne affaire », surtout si son prix est inférieur à 1 million d'euros, voire à 500 000 € pour les plus délabrés (soit le budget actuel d’un beau deux-pièces à Paris), l’investissement humain et financier est autrement plus lourd. Il est difficile à estimer tant les travaux dépendent de son état, de sa surface globale (incluant les communs et les dépendances), de la complexité et du type de travaux à réaliser pour sa restauration et autres éléments techniques. À titre d’exemple, pour un « petit » château de 400 m2, le coût global de sa restauration peut vite dépasser les 500 000 €, et aller bien au-delà du million dans le cas d’une ruine. Certes, les subventions permettent d’alléger la note, mais il est indispensable d'avoir une bonne visibilité sur le coût total du chantier en amont – ainsi que des frais d’entretien annuel qui se chiffrent en milliers d'euros – pour ne pas déchanter et voir son rêve tomber en ruine !

De nombreux passionnés se lancent dans la grande aventure de l’achat et de la restauration d’un château en vue de le transformer en lieu de réception et d’hébergement – hôtel de luxe, chambres d’hôte, salles de séminaires... voire en musée, en vue de rentabiliser à terme leur investissement.

Les étapes clés de la restauration d’un château

Entreprendre la restauration d’un château implique de suivre rigoureusement un certain nombre d’étapes et de s’armer de patience et de persévérance. Les chantiers successifs peuvent facilement s’étaler sur plusieurs années, y compris, en l’occurrence, en raison de leurs coûts faramineux. Alors si tout est bien ficelé côté étapes préliminaires – diagnostics, projet de programme des travaux, autorisations préalables, coût global et liste des travaux nécessaires à la restauration, sélection et validation des artisans et entreprises spécialisés dans le bâti ancien... –, les travaux peuvent commencer !

Trois grandes étapes à la clé :

  • Pour la restauration d’un château, les travaux démarrent systématiquement par le gros œuvre, qui représente aussi la tranche la plus onéreuse du devis global, car plus complexe, technique et au long cours. De fait, la rénovation du gros œuvre peut concerner les travaux de maçonnerie, de menuiserie, un ravalement de façade, la rénovation de la charpente, mais encore celle de la toiture du château et de sa couverture, le plus souvent en ardoise. Cette partie représente l’un des chantiers les plus important dans une restauration, surtout si des problèmes d’étanchéité ont été constatés.  
  • Une fois les chantiers relatifs au gros œuvre achevés, c’est au tour du second œuvre ou des travaux intérieurs de démarrer. Et ce n’est pas une mince affaire non plus quand on sait que la surface moyenne d’un château avoisine les 700 m2 ! Au-delà des gros postes comme le système électrique, la plomberie et l’isolation du bâti, il convient de porter une attention particulière aux travaux d’aménagement intérieur et de restauration des éléments anciens afin de préserver l’intégrité des lieux. De fait,  redonner une seconde vie aux revêtements, moulures, rosaces, cheminées monumentales, volutes, vitraux, décors sculptés, fresques... impose de faire appel à des artisans d’art et à des spécialistes rares.  
  • Une fois les chantiers achevés, le maître d’ouvrage (le propriétaire) et le maître d’œuvre (l’architecte) sont censés valider la « réception des travaux », en vérifiant leur conformité par rapport au cahier des charges. Si le château est classé ou inscrit au répertoire des monuments historiques, un dossier documentaire des ouvrages exécutés (DDOE) est remis en 4 exemplaires au propriétaire, qui doit à son tour en transmettre en 3 exemplaires aux unités départementales de l'architecture et du patrimoine (UDAP), qui constituent les unités départementales de la Drac.

Pour les châteaux classés, à réception du DDOE, la Drac se prononce sur la conformité des travaux réalisés dans un délai de 6 mois suivant leur achèvement. Elle rédige ensuite un certificat de conformité des travaux au projet autorisé, ce qui permet de débloquer le versement du solde des subventions publiques s'ils ont fait l’objet d’un financement de la part de l’État.

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