Ultra-luxe : des territoires prisés et une résilience remarquable

Laetitia Lapiana
Partager sur
FacebookTwitterLinkedin

Traditionnellement à l’abri des vents contraires, le segment de l’ultra-luxe a pourtant accusé le coup ces deux dernières années, avec un net ralentissement de l’activité sur fond d’incertitudes géopolitiques. Entre résistance et résilience, cette petite niche stratégique et symbolique reprend du galon, grâce au retour des acheteurs étrangers et à l’effet refuge doré.

Image
cap ferrat
Appelée la presqu'île des milliardaires, Saint-Jean-Cap-Ferrat est réputée pour ses sublimes demeures nichées entre pinède et plages intimistes dans l'un des plus beaux écrins de la Méditerranée. @ Getty Images
Sommaire

2024, une année tout en retenue dans l’ultra-luxe

La maxime qui veut que « le luxe ne connaît pas la crise » n’a pas tenu toutes ses promesses ces deux dernières années. Sur l’ensemble du marché du prestige (premium, luxe et ultra-luxe), la baisse de l’activité a frappé fort en 2024 avec -20 % de volumes, autrement dit 9 000 transactions de moins par rapport à 2023.

Un repli plus saillant dans le segment de l’ultra-luxe, où la chute a été de 55 %, soit seulement 430 ventes, contre près d’un millier l’année précédente. Comme le confirme Thomas Lefebvre, vice-président data chez Belles Demeures, spécialiste de l'immobilier de prestige : « C’est le segment ultra-luxe qui enregistre la chute la plus importante de l’activité. C’est un signe d’ajustement conjoncturel qui montre sa forte exposition aux incertitudes macroéconomiques. »

Belles Demeures redéfinit les frontières de l’immobilier de prestige en trois segments – premium, luxe et ultra-luxe –, chacun avec des seuils de prix distincts selon les territoires. L’ultra-luxe concerne les biens d’une valeur supérieure à 8 M€ à Paris et à 5 M€ dans les départements d’exception : Alpes-Maritimes, Var, Bouches-du-Rhône, Hauts-de-Seine et Corse-du-Sud.

Peu de ventes, mais des prix qui résistent

À contre-courant d’une activité en perte de vitesse, les prix dans l’ultra-luxe ont, eux, gagné en puissance, avec une hausse de 5,3 % en un an. Une remontada qui détonne, là où les prix des segments premium et luxe se réajustent en douceur et où ceux du marché traditionnel accusent une baisse généralisée plus accentuée.

Particulièrement sélectif, l’ultra-luxe se distingue par une valeur échangée « hors-norme », davantage dictée par la rareté de l’offre disponible et le facteur « émotion », que par des calculs savants basés sur des estimations au mètre carré.

Une valeur patrimoniale stratégique et symbolique

Avec des transactions record qui se chiffrent souvent à plusieurs dizaines de millions d’euros, et parfois même au-delà des 100 M€, les sommes en jeu sont colossales. Elles se mesurent autant par les caractéristiques qualitatives d’un bien que par sa dimension symbolique et les valeurs intangibles qu’il véhicule. L'ultra-luxe faisant appel au rêve, à la beauté intemporelle et à la sensation d’exclusivité et de « privacy ».

Ces fondamentaux façonnent le marché et influencent son évolution... Dans ce contexte, il pourrait suffire d’une vente à 8 ou 9 chiffres pour renverser la vapeur, car avec un très petit volume de ventes et des prix exorbitants, l’ultra-luxe peut voir son marché basculer inopinément de la grisaille à un soleil éclatant.

De la résistance à l’hyper résilience

Et c’est bien ce qui est à l’œuvre depuis la fin de l’année 2024, avec un renversement des tendances et une activité qui reprend doucement son souffle. De fait, plusieurs indicateurs du marché, dont l’indice d’évolution de la demande par Belles Demeures, s’affichent en faveur d’une reprise.

En marge d’un regain d’intérêt sur l’ensemble du marché de prestige, avec une demande en hausse de 8 % en un an, l’ultra-luxe retrouve des couleurs, porté par le dynamisme de ses territoires les plus emblématiques.

Paris et la Côte d’Azur, terres de prédilection de l’ultra-luxe

Fiefs historiques du luxe extrême, Paris et les pépites les plus prisées de la French Riviera raflent nettement la mise, avec des chiffres qui donnent le vertige.

  • Paris s’impose avec un prix médian de 10,5 millions d’euros, le plus élevé à l’échelle des départements, et bénéficie d’un rebond spectaculaire de la demande (+ 43 % en un an). 
  • La région Paca confirme son statut de poids lourd dans le luxe et l’ultra-luxe, en captant 40 % des transactions nationales.
  • Les Alpes-Maritimes dominent avec des transactions record et plusieurs clusters dorés sur le podium des villes les plus chères de France en prix médian, à l’instar de Saint-Jean-Cap-Ferrat (22 M€), Villefranche-sur-Mer (12,5 M€) ou Cannes et Antibes (10 M€).

58 M€. C’est le montant de la vente d’une propriété de 850 m2 à Roquebrune-Cap-Martin (Alpes Maritimes), non loin de Monaco.

Entre désir de luxe extrême et refuge patrimonial

Paris et la Côte d'Azur sont donc les deux mastodontes de l’ultra-luxe qui se partagent l’essentiel du marché, même si la côte Atlantique et d’autres territoires clés profitent également de cette embellie depuis quelques mois.

Sans surprises, les biens les plus prisés alternent, pour l’essentiel, entre la villa de rêve avec piscine nichée dans l’un des plus beaux écrins de la Riviera et l’hôtel particulier ou l’appartement bourgeois avec terrasse et vue sur les monuments parisiens dans les beaux quartiers de la capitale. « Soutenu par les étrangers d’Asie, du Moyen-Orient, d’Amérique du Nord et les entrepreneurs français, l’ultra-luxe parisien reste une valeur refuge de long terme », confirme Sébastien Kuperfis, président du réseau d’agences Junot.

Des exigences dignes de la vie de palace

En marge de l’effet « refuge patrimonial doré », le désir de s’octroyer une part de rêve ou un bout de carte postale reste vif auprès d’une clientèle internationale d'ultra-riches fortunés en quête d’un bien unique répondant à l’ensemble de ses attentes. « Les acquéreurs fortunés sont très exigeants et savent très exactement ce qu’ils veulent, précise Charles-Marie Jottras, président de Daniel Féau. Si on leur propose ce qu’ils recherchent, ils n’hésiteront pas un instant. »

Si les biens clés en main à l’emplacement d’exception peuvent s’échanger séance tenante et « cash », la prise en compte des nouvelles exigences valorise surtout les produits dignes des standards internationaux des palaces, tant en termes de caractéristiques rares que de prestations de haut vol et de confort ultime. « Pour la clientèle américaine et asiatique, il est impensable d’acheter un bel appartement parisien ou un hôtel particulier sans climatisation. C’est culturel ! » précise Sébastien Kuperfis.

Cet article vous a été utile ?
0
0

Pouvez-vous nous préciser pourquoi ? (facultatif)

Partager sur
FacebookTwitterLinkedin
Ces articles peuvent vous intéresser
A la une !